Le Nouveau monde libre

le Jourdain au nord du lac de Tibériade

Un quart de siècle a passé depuis la chute du mur de Berlin ayant symboliquement marqué la fin de la guerre froide et la victoire des démocraties sur le système communiste qui avait contribué à la victoire sur le nazisme en 1945, pour immédiatement en retirer les bénéfices en faisant tomber le rideau de fer sur  la moitié de l’Europe. Cette victoire apparente en 1989 a laissé dans l’ombre, la même année, le retrait définitif des Soviétiques d’Afghanistan qui a permis aux Talibans et à l’islamisme radical de prospérer dans un pays  historiquement instable et imperméable aux invasions étrangères. 1989 est aussi l’année de la répression du printemps étudiant de Pékin, de l’instauration de la loi martiale, des massacres, des arrestations ultérieures et de l’arrêt des réformes politiques qui ont conduit les dirigeants chinois à accélérer le développement d’un système capitalo-communiste inédit.

Depuis un quart de siècle, les démocraties occidentales aveuglées par une victoire surprise ont cru avec légéreté à la Fin de l’histoire et aux vertus du système capitaliste qui permettrait de dissoudre dans l’abondance les régimes communistes ou islamistes pour emprunter le chemin vertueux de la démocratie. Non seulement, il n’en a rien été, mais ce sont les démocraties qui, à force de concession avec les uns et les autres, renoncent progressivement aux principes démocratiques sous les coups de boutoir de l’argent qui corrompt tout.

L’histoire tourne au cauchemar : argent sale du pétrole, du gaz ou de la drogue, paradis fiscaux, criminalité internationale, évasion fiscale des grandes entreprises mondiales,  milliardaires narcissiques, transactions financières gigantesques hors de contrôle, endettement colossal des Etats appelé pudiquement dettes souveraines qui ne sont que la contrepartie de fonds souverains royalement douteux, rien ne va plus au jeu de la roulette capitaliste.

Il est temps d’assainir la situation, ce qui ne peut venir que des régimes démocratiques. Les systèmes dictatoriaux ou communistes n’ont pour but que de maintenir des oligarchies au pouvoir le plus longtemps possible, elles n’ont pas d’autre intérêt que de se perpétuer de génération en génération en maintenant dans l’asservissement le plus grand nombre de leurs compatriotes. L’exemple chinois est révélateur de cet état de choses : la caste dirigeante veille à retirer l’essentiel des bénéfices de la croissance réservés à un quart de la population, tandis que les trois quarts des chinois en sont exclus, ou plus exactement sont exploités dans l’Atelier du monde, au profit de la classe dirigeante chinoise et des consommateurs mondiaux.

Il n’y a rien à attendre des G7, G8 ou G20 pour remettre sur les rails un système économique mondial à la dérive. Le seul chemin qui puisse être emprunté est de fermement revenir, à l’échelle mondiale, aux principes démocratiques, non pas en constituant un club fermé des vieilles démocraties libérales, celui de l’ancien monde libre d’avant 1989, mais en constituant un Nouveau monde libre à partir du noyau dur des démocraties occidentales pour inviter progressivement les nouvelles démocraties émergentes à les rejoindre. Il est consternant de voir des pays comme le Brésil, l’Inde ou l’Afrique du sud rejoindre la Chine et la Russie des oligarques pour constituer des organisations internationales aux motivations négatives : les discussions stériles qui sont conduites dans ces enceintes ne peuvent mener qu’à l’impasse politique et économique car celles-ci sont fondées uniquement sur l’antiaméricanisme ou l’antioccidentalisme primaire comme au bon vieux temps de la Guerre froide ou du Tiers-mondisme guevariste. Le ciment est fragile, effrité avant même d’être injecté.

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C’est pourquoi, si nous voulons que le monde change dans la bonne direction, il faut que la quarantaine de Vieilles nations démocratiques s’organise durablement et qu’elles proposent un statut d’association durable aux nations démocratiques émergentes, fondé non sur la puissance économique mais sur les vertus intrinsèques de la démocratie. Ces démocraties émergentes peuvent avoir une longue antériorité comme l’Inde, une solide assise comme le Brésil ; mais elles peuvent aussi véritablement chercher à s’installer comme dans certains pays d’Asie ou d’Afrique, tels que le Bénin, l’Ethiopie, le Sénégal, le Ghana.

Pour aller dans la bonne direction, la priorité est d’aider ces nations démocratiques émergentes à adopter durablement toutes les règles démocratiques, sans en oublier aucune, de la liberté d’expression à la liberté religieuse, en passant par le respect des personnes, quelles qu’elles soient y compris les personnes les plus vulnérables,  femmes, enfants et même, prisonniers, car c’est souvent l’état des asiles et des prisons qui permettent d’évaluer la réalité d’une société avancée. Il n’est pas certain à cet égard que la France, pays des droits de l’Homme, soit si exemplaire.

Et puis, il faut être raisonnable. l’instauration de la démocratie est une longue marche. L’Angleterre fête cette année les 800 ans de la Magna Carta qui est à l’origine de tout le processus démocratique ayant conduit le royaume-Uni à être nons seulement une nation démocratique vertueuse mais la démocratie vaillante en 1940, dernier rempart européen démocratique face au Nazisme. Alors, soyons fermes mais indulgents avec tous les pays qui veulent adopter les principes de la démocratie. Mais surtout, cessons de nous rendre complices des crimes commis par les régimes dictatoriaux. Et commençons par dire à Monsieur Poutine que nous ne sommes pas dupes de sa technique de saucissonage qui rappelle celle du nazisme : annéantissement de la Tchétchénie, invasion limitée de la Georgie, séparation de la transnitrie de la Moldavie, occupation de la Crimée, puis du Don, l’heure est venue de faire preuve de fermeté si nous ne voulons pas qu’il poursuive ailleurs son rêve de Grande Russie. C’est pourtant un de ses compatriotes, Tolstoï, qui dit un jour que le patriotisme était en soi condamnable. tolstoï a raison. il faut être universaliste et non nationaliste.

(A suivre : The One direction)