Dévouement et discernement en circonstances de détresse

Une grande métamorphose pour l’Hôtel-Dieu de Paris

Dans notre précédente chronique publiée le 20 mars consacrée au Coeur intelligent, nous évoquions le besoin de mettre l’accent sur l’intelligence et la connaissance comme chemin pragmatique de spiritualité pour construire un monde pour les hommes libres, et donc de faire preuve en toutes circonstances de dévouement et discernement.

Le discernement est justement ce que l’Archevêque de Paris, Michel Aupetit, appelle de ses voeux dans une lettre adressée le 21 mars aux soignants confrontés à la détresse précipiteuse et à la mort, provoquées par l’épidémie de Coronavirus. Outre le discernement, l’Archevêque nous appelle à faire confiance à la compétence et la responsabilité des soignants en rappelant leur courage et leur dévouement qui sont l’essence même de leur vocation.

Fils d’un médecin de campagne qui oeuvra trente-six ans auprès de ses patients résidant dans douze villages du Haut-Anjou, l’Auteur virtuel souhaite faire connaître cette lettre de confiance au corps médical dans son ensemble. Nous ajouterons plus particulièrement pour les médecins qu’ils sont en toutes circonstances tenus par le serment d’Hippocrate remis à jour en 2012 par le Conseil national de l’ordre, un serment qui est autrement plus « spirituel » qu’un code déontologique bureaucratique. Et c’est pourquoi nous soutenons toute initiative thérapeutique telle que l’expérimentation menée à Marseille avec la Chloroquine. Diagnostiquer et traiter, telle est la vocation première des médecins pour porter secours, sans attendre ordres et contre-ordres d’une hiérarchie balbutiante.

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Paris, 21 mars 2020

Chers amis soignants,

Je tenais tout d’abord à vous remercier d’être en première ligne pour secourir nos concitoyens. Vous retrouvez le sens profond de votre vocation : soigner vos frères humains qui sont dans la détresse. Alors que tant de personnes ont quitté la grande ville et travaillent à distance, vous êtes tous bien présents au front avec courage et dévouement. J’espère profondément que la nation saura s’en souvenir quand les temps seront meilleurs.

Il peut arriver devant l’afflux des malades que vous soyez confrontés à de vrais problèmes de conscience. Lorsque ceux-ci seront plus nombreux que les respirateurs qui peuvent leur sauver la vie, vous pourrez être amenés à faire des choix douloureux. Il ne faut surtout pas parler, comme je l’entends quelquefois, de faire un «tri» entre les malades. La fin recherchée qui est de sauver la vie ou de soulager le patient, est commune à tous. Les moyens pour y parvenir doivent être proportionnés à la réalité sanitaire.Le Pape saint Jean Paul II dans son encyclique l’Évangile de la vie nous donne des clés de compréhension: « Il est certain que l’obligation morale de se soigner et de se faire soigner existe, mais cette obligation doit être confrontée aux situations concrètes; c’est-à-dire qu’il faut déterminer si les moyens thérapeutiques dont on dispose sont objectivement en proportion avec les perspectives d’amélioration » (EV n°65). C’est donc votre discernement concerté entre soignants qui, devant ces situations concrètes, permettra d’ajuster la réponse en fonction de l’état du patient et de ses chances objectives de survie. Cela relève de votre compétence et de votre responsabilité.

Comme tous nos concitoyens, je vous fais confiance, vous remercie encore de votre implication généreuse et, si vous le souhaitiez, mes frères prêtres et moi-même,nous nous tenons à votre disposition pour vous soutenir spirituellement s’il en est besoin ainsi qu’auprès des mourants, des malades et de leurs familles.

Soyez assurés de ma prière et de ma reconnaissance.

Michel Aupetit
Archevêque de Paris

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Cette lettre remarquable dont nous partageons chaque mot, nous fait subitement penser à l’Hôtel-Dieu implanté à l’île de la Cité, auprès de Notre-Dame de Paris dont Victor Hugo nous rappelle :

D’un côté vous voyez l’édifice admirable

Où la mère de Dieu reçoît notre oraison

Plus loin vous découvrez l’hôpital

Où les membres de Dieu cherchent leur guérison.

Mais bons sang, mais c’est bien sûr, il est en travaux interminable notre Hôtel-Dieu quatorze-centenaire, avec la perspective de transformer l a vocation du premier hôpital parisien édifié en 651 par Saint Landry, vingt-huitième évêque de Paris. Il s’agirait de consacrer un tiers de la surface immobilière à un temple commercial touristique, comme nous l’apprend le journal La Croix  le 19 mai 2019 : dans quelques années, l’Hôtel-Dieu ne sera plus exclusivement un hôpital. Situé en plein cœur de Paris, sur l’Ile de la Cité, le plus vieil hôpital de la capitale, propriété de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), va céder plus d’un tiers de sa surface, soit 22 000 m² à un promoteur immobilier.

Question discernement, le moins que l’on puisse dire est qu’il en faudrait un peu tout de même quand il s’agit de l’Île de la Cité, le Coeur intelligent de Paris et de la France, où tout est plus ou moins laissé à l’errance ou l’abandon entre marché aux fleurs fané, Notre-Dame incendié et écroulé, Hôtel-Dieu dévasté par l’argent fou, sans oublier l’exode irréfléchi du Palais de justice et du quai des Orfèvres aux Batignolles, sans même commencer ses préoccuper à ce jour des espaces abandonnés. Seule, au milieu des décombres, la Sainte Chapelle tient au firmament du ciel.

Et puisque nous sommes privés de sortie, voici que faire et découvrir virtuellement à Paris en attendant les beaux jours qui, cette année ne correspondront pas à la venue du printemps mais que des hirondelles à bicyclette. Ces beaux jours viendront quand, tous ensemble, nous recevrons notre billet de sortie en bonne santé et le moins de victimes grâce à nos soignants. 

île de la Cité Paris iStock 600x330

Joyeux printemps et longue vie à tous en Union de prière pour la Délivrance aux captifs.