Je prends ce que je veux

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L’enfer existe et il est situé à Bercy  où  le code des impôts et le livre des procédures fiscales constituent les outils de prédilection de l’Etat pour malmener le tout-venant. 

Louis de Rouvroy, duc de Saint-Simon et mémorialiste du siècle de Louis XIV et de la Régence, mentionne une réponse du Roi-Soleil à un ambassadeur à la Cour qui lui demandait comment il réussissait à financer ses guerres innombrables et interminables: Je prends ce que je veux. En ces années de disette fiscale et circulation virale de la Covid 19, comment ne pas songer à cette phrase qui est le principe fondamental de tout bon gouvernement en France, que celui-ci soit un royaume, un empire ou une République : prendre ce que l’on veut de votre argent, de votre temps et de votre vie, sans jamais avoir à se justifier; et faire ce que l’on veut de ce que l’on prend en comptant sur les intendants des finances et les gabelous pour amasser l’argent dans les caisses de l’Etat aussi vite vidées, quoiqu’il en coûte. Et comme pourrait le dire un intermittent d’opéra bouffe au spectacle de cette valse des milliards, sachant qu’à la table de l’Etat personne ne mégote sur le magot: Laisse aller, c’est une valse.

En fait, le duc de Saint-Simon ne fait que reprendre une expression inventée de toute pièce par son prédécesseur en chroniques royales, Philippe de Commynes, un temps conseiller du roi Louis XI, qui eut l’insigne honneur d’être « assigné à résidence » pendant cinq mois dans une cage de fer au donjon de Foulques Nerra à Loches, comme quoi tout confinement n’est pas sans charme ni confort.

Dans ses mémoires, Philippe de Commynes, écrit : notre roi est le seigneur du monde qui le moins a cause d’user de ces mots : J’ai privilège de lever sur mes sujets ce qui me plaît ; et ne lui font nul honneur ceux qui ainsi le disent pour le faire estimer plus grand ; mais le font haïr et craindre aux voisins, qui pour rien ne voudraient être sous sa seigneurie, et même aucuns du royaume s’en passeraient bien qui en tiennent ; mais si notre roi ou ceux qui veulent l’élever ou l’agrandir disaient : j’ai des sujets si bons et si loyaux qu’ils ne refusent chose que je leur demande ; et je suis plus craint obéi et servi de mes sujets que nul autre prince qui vit sur la terre, et qui plus patiemment endurent tous maux et toutes rudesses et à qui moins ils se souviennent de leurs dommages passés, il me semble que cela lui serait grand los ( honneur) et en dis la vérité que non pas de dire : je prends ce que je veux et en ai le privilège, il me le faut bien garder. Le roi Charles Quint [Charles V] ne le disait pas, aussi ne l’ai-je pas ouï dire aux rois, mais je l’ai bien ouï dire à aucuns de leurs serviteurs auxquels ils semblaient qu’ils faisaient bien la besogne ; mais selon mon avis ils se méprenaient envers leur seigneur et ne le disaient que pour faire les bons valets, et aussi ils ne savaient ce qu’ils disaient.

La grandeur de la France n’est pas ses monuments, sa littérature, ses vins ou ses fromages, mais son administration fiscale, Bercy, la forteresse imprenable qui décide de tout, en tout et pour tout, considérant que les Français ne sont pas des citoyens mais des contribuables asservis à la grandeur; et qu’à ce titre, ils doivent se soumettre à la législation fiscale, un incroyable enchevêtrement de textes illisibles, un fatras d’articles innommables qui rend la cigüe de Socrate sympathique à boire.

Rien n’a changé depuis Louis XI ou Louis XIV, les rois, empereurs et président successifs. On en veut pour preuve que les Français culminent désormais au sommet de l’échelle en matière de prélèvements obligatoires et dépenses publiques dans les classements de l’OCDE, rivalisant avec le Danemark qui décroche. Il existe cependant une différence avec le règne de Louis le Grand. L’argent était alors prélevé pour financer des guerres ce qui n’est plus le cas ou fort peu, les charges de la Défense nationale ne représentant guère plus de 2% du PIB sur un total de 56% de dépenses publiques. Où va alors l’argent prélevé sur la richesse nationale ? C’est là un grand mystère, un peu partout et nulle part, pour mille choses et plus encore, dans un désordre éblouissant où la Cour des comptes ne s’y retrouve guère plus qu’un amateur des trois cents fromages produits en France ou un oenologue pressé de goûter la multitude des vins enfouis dans les caves de vigneron à travers la doulce France. Et le résultat est saisissant. Amusez-vous à réduire de cinq euros telle ou telle allocation, la jacquerie couve, l’émeute surgit, les villes et les campagnes s’enflamment, pour cinq euros c’en est fait du bonheur des Français.

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Nicolas Fouquet, surintendant des finances de Louis XIV, charge qui n’était pas alors une sinécure. On pouvait passer le reste de sa vie au cachot. Comme quoi nos moeurs sont plus doux aux bons valets.

Et encore cela n’est rien. Le Roi-Soleil qui pouvait déjà prendre tout ce qu’il voulait, serait abasourdi des progrès de son administration fiscale. La Révolution française n’a rien changé aux moeurs fiscales: le surintendant des finances qui manoeuvre à Bercy est toujours l’homme le plus puissant de France, il règne sur les bons valets de Bercy, Ce sont eux qui font ce qu’ils veulent au point de réussir l’exploit méconnu d’envoyer à l’Elysée un jeune freluquet de quarante ans, un sympathique inspecteur des finances destiné nitialement à faire avaler aux Français, la potion finale, l’inéluctable tour de vis fiscal en vue de combler le déficit quadragénaire. A ce sujet, il est rarement souligné que notre actuel président de la République n’a jamais vécu qu’en univers déficitaire de l’Etat, le déficit ayant fêté lui aussi ses quarante ans.  Et pourtant c’est une cruelle réalité.

De même, on ne soulignera jamais l’incroyable capacité des bons valets de Bercy à inventer de nouveaux impôts. La gabelle n’est plus ce qu’elle était. Désormais on nage dans l’acronyme anonyme, TVA, ISF, IRPP, TIPP, CSG, à chaque nouveau ministre des finances, l’inauguration en fanfare d’un nouvel acronyme fiscal pour marquer à l’écu rouge comme le fer, son règne. Les Danois qui ne sont pas réputés être des imbéciles et taxent beaucoup, ont pourtant peu d’impôts réputés de plus être clairs, au point qu’ils sont capables d’expliquer avec précision comment et où va l’argent prélevé, avec un taux de TVA élevé à 25%, un impôt sur le revenu payé par 90 à 95% des habitants et non, comme en France, à peine 50% de la population, le tout sans niches fiscales ce qui est d’autant plus méritant pour des Danois, tandis que les Français préfèrent nourrir à l’Elysée sur les deniers publics, des labradors d’Etat qui se succèdent, plus ou moins, de président en président depuis François Mitterrand.

Château de Vaux-le-Vicomte, si Vaux m'était conté - Détours en France

Avec les rois de France, on savait au moins où allait l’argent : dans les châteaux! Ici, le château de Vaux-le–Vicomte qui fut la propriété de Nicolas Fouquet avant qu’il ne soit embastillé et ne perde tous ses biens. Et nous, que laisserons-nous aux générations futures en dehors de déficits abyssaux ? 

Or donc, un gouvernement chassant l’autre, il avait été promis que cette fois, on allait voir ce qu’on allait voir et que les prélèvements seraient stabilisés à défaut de diminuer. Depuis le regretté Charles Pasqua l’enjoliveur, personne n’ignore en France que les promesses n’engagent que ceux qui veulent bien y croire. Et donc, voyant ce que nous verrons, les impôts s’alourdissent de 4 à 5 milliards d’euros chaque année après les traditionnels cadeaux fiscaux de début de quinquennat pour que les riches soient plus riches et les pauvres plus pauvres, idéologie de masse qui fait ses preuves dans le monde entier comme en témoigne une étude récente sur le sujet.  Tout cela démontre à l’évidence que les bons valets de Bercy travaillent bien, qu’ils excellent en imposition nouvelle, ancienne et rustique, et qu’en France, tout va bien dans le meilleur des mondes fiscaux. Jusqu’à la Covid-19 qui complique un peu les choses hélas, mais pas autant qu’il serait possible de le croire, le « quoiqu’il en coûte » permettant d’ouvrir les vannes jamais fermées du déficit et de transformer les dettes en impôts différés dans le temps, jusqu’au retour à meilleur fortune du pot où la poule et le coq méditent sur le sort réservé aux Gaulois réfractaires à l’impôt par les crânes d’oeuf élevés en batterie dans les écoles de l’Etat.

L’ennui, c’est qu’il arrive à force de prendre tout ce qu’on veut, qu’on en perde la tête sur le billot et qu’elle tombe dans le panier. Les pirouettes fiscales finissent par lasser, le chômage de masse devient un épouvantable épouvantail qui dissimule une pauvreté effrayante, criante dans les campagnes et les banlieues, jusque dans les villes les plus riches où des migrants abandonnés à leur sort errent sans fin. Tout cela n’augure rien de bon. Il n’est pas certain qu’à la prochaine et inéluctable crise financière, la valse des milliards permette de masquer la dure réalité, celle d’un pays qui ne cesse de s’appauvrir depuis une décennie, après quarante ans de déficit, l’âge actuel du capitaine.Image associée

Pour la grandeur de la France, se couvrir de dettes, trois mille milliard d’euros à ce jour, reste une tradition qui traverse les siècles

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