Ce n’est plus Mary à tout prix qu’on adapte dans l’édition française ces jours-ci, mais le fric à tout prix qui compte. Voici qu’une étrange maladie atteint nombre d’éditeurs français depuis quelques temps, la laïcisation des romans classiques de la jeunesse, la disparition purement et simplement de toute référence à la religion chrétienne au motif que la jeunesse française serait dans l’impossibilité de comprendre la symbolique ou l’esprit de livres écrits à une époque qui n’est pas la notre. Nous voici donc arrivés aux temps de la modernisation de la littérature, jusqu’à la réécriture de livres d’auteurs trépassés tels qu’Enyl Blyton à qui on ne demande pas son avis pour transformer le chapitre consacré à « une messe à l’église de Trémanoir » en « promenade au marché » (biologique ?)
Disons le clairement, dans cette affaire, l’ignoble le dispute à la saloperie, la connerie et la perversion à l’image d’une certaine France prête à tous les renoncements, toutes les trahisons et toutes les crapuleries de notre histoire quand celle-ci s’enfonce dans la violence et la haine. Il faut être moralement tombé très, très bas pour que des maisons d’édition s’amusent à biffer des pans entiers des œuvres d’Hergé, de la comtesse de Ségur, du Club des cinq (et oui !) ou des Quatre filles du Dr March. Si ces livres ne conviennent pas aux mœurs de notre temps, trouvez donc des auteurs modernes, mais charcuter des œuvres près de deux siècles plus tard relève de l’infâme.
Tout cela prêterait à un simple sourire sinistre si dans le droit fil de ce mouvement de réécriture de livres classiques pour la jeunesse, on peut désormais imaginer que les éditeurs scolaires en viennent désormais à procéder à des coupes sélectives politiquement correctes dans les oeuvres des auteurs classiques tels que Voltaire, Montesquieu, Diderot ou Hugo et même, plus proches de nous, Aragon, Céline ou Eluard, et pourquoi pas passer à la trappe éditoriale, les appels au crime de Céline, les chants lyriques staliniens d’Aragon, sans oublier d’évacuer les écrits esclavagistes ou racistes de Voltaire, bref tout ce qui n’est pas adapté à nos esprits biologiques d’aujourd’hui, pré-formatés aux ahurissants abrutis d’ambiance que sont devenus les professionnels des médias et de l’édition . Lire l’auteur virtuel devient une œuvre salutaire pour ceux confrontés tous les jours aux crétins des Alpes, idiots du village et imbéciles de banlieue se prenant pour des intellectuels !
Version de Tintin au Congo rendue politiquement correcte par un emprunt judicieux à la langue thaï, et donc prête pour l’emploi à l’école
A une époque où les injures sont la langue préférée des médias, où le sexe s’affiche partout, où les exécutions barbares commises en Arabie saoudite, Iran ou par Daech sont en accès libre sur l’internet par une recherche simple dans Google image ou sur YouTube, il y a quelque chose d’assez invraisemblable à ce que des éditeurs, et pas les plus petits, payent des traducteurs ou des chargés d’édition à traquer et évacuer notre histoire religieuse jusque dans la littérature pour enfants. La méthode est perfide mais elle n’est guère différente des Nazis qui brûlaient les libres qui ne leur convenaient pas, ou que des communistes qui fusillaient ou déportaient les auteurs qui prenaient des libertés avec la vulgate rouge. C’est moins violent mais plus discret.
Mais pourquoi s’en prendre à la comtesse de Ségur et supprimer purement et simplement un chapitre décrivant une scène de baptême ? Tout simplement, selon l’éditeur même, pour que ces livres puissent être prescrits dans les écoles laïques, et donc rapporter à l’éditeur. Il paraîtrait que des références à la religion chrétienne ne permettraient plus aujourd’hui que ces ouvrages soient utilisés en classe, belle preuve de tolérance et de « compréhension française » pour reprendre une expression employée le 27 avril 1956 par Aragon dans une conférence donnée à Angers consacrée à deux hommes que tout séparait, le sculpteur David d’Angers, fils de général républicain, et Bonchamps, le généralissime des armées vendéennes : Allez à Saint-Florent, allez à ce belvédère d’une de nos terribles histoires par delà l’autre siècle, à ce lieu de division. [Ce » lieu de division » a fait l’objet de plusieurs chroniques de l’auteur virtuel en 2015, telles que Grâce aux prisonniers, Vae victis le baptême patriotique, Une existence toute entière]
Si nous ne voulons pas que « les heures terribles de notre histoire » s’emballent au galop, il est plus que temps de revenir vers la France et son histoire, toutes affaires cessantes et en appeler à tout ce qui unit plutôt que ce qui divise, comme le geste admirable du général vendéen catholique graciant les prisonniers républicains et qui reçoit l’hommage du sculpteur David d’Angers, fils de général républicain, pour avoir ainsi sauvé son père qui figurait parmi les prisonniers menacés d’être fusillés : A Saint-Florent, toujours selon Aragon, s’est noué un acte poétique « à la mesure d’un des plus beaux paysages du monde, où souffle vers la mer le vent républicain… Regardez, je vous dis, regardez bien : car ceci au-delà des jugements et des systèmes, écoutez-moi, ceci c’est la France. ».
Et bien, je vous le dis, peu importe que les temps changent, on ne change pas l’histoire, on ne change pas les histoires contées aux enfants, de même que Clovis ou Jeanne d’Arc appartiennent à l’histoire de France, La comtesse de Ségur ou Enil Blyton, appartiennent aussi à l’histoire de la littérature pour la jeunesse, dont les livres sont aussi un lieu de « compréhension française« , tels qu’ils sont et non comme on voudrait qu’ils soient désormais.
Mesdames, messieurs les éditeurs, on ne censure pas la comtesse de Ségur qui est de son temps, on ne réécrit pas l’histoire, on ne brûle pas au ciseau et à la colle une œuvre qui ne vous convient plus, on ne fait pas un travail digne des censeurs nazis et communistes qui font de vous des salopards et des criminels moraux, non par idéologie mais rien que pour le fric, tout cela pour le fric, pour le fric à tout prix, en ignorance totales des droits moraux de l’écrivain et du respect de la vérité littéraire à laquelle vous substituez votre cécité.
Pourquoi quatre filles ? Pourquoi pas trois ? Cinq ? La question n’est pas anodine pour l’auteur. L’éditeur lui s’en fout, pourvu que cela rapporte.
Pour ceux qui veulent trouver les traces des crimes éditoriaux, voici le lien vers un site informant des « actes christianophobes » dont l’auteur virtuel ne partage pas certains commentaires excessifs qui divisent plus qu’ils unissent, et pour d’autres inutilement agressifs, certains commentaires laissés par des lecteurs étant aussi « islamophobes » que d’autres ailleurs « chritianophobes ». La surenchère n’est jamais la solution. Mais ce site comme tant d’autres, fait partie de ceux qui permettent parfois de se tenir au courant du monde loin de l’information officielle édulcorée, genre AFP qui fournit aujourd’hui l’essentiel des dépêches réutilisées par la presse française anémique, amnésique et crapuleuse :
- Les Quatre filles du Dr March (de Mrs Alcott), au Livre de Poche Jeunesse
- Le club des cinq au bord de la mer, d’Enyl Blyton, « la modernisation » de la Bibliothèque rose selon Hachette Jeunesse
- Quand l’ethnologue remplace le missionnaire (Casterman, 1993)
- Pauvre Blaise, de la comtesse de Ségur, aux éditions Max Milo
Le missionnaire de l’album Stratonef H 2 de Jo & Zette, d’Hergé remplacé par un ethnologue : il est temps que la capitaine Haddock cesse de boire !