Kirikou et Poil de carotte chez la marchande de Nutella

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Dans une précédente chronique, nous avons évoqué comment notre élite policière poursuivait de toute leur sollicitude les jeunes Noirs en France au point de susciter une haine permanente qui transforme les banlieues  en chaudron, où le moindre incident allume des incendies qu’aucune lance ne peut plus éteindre comme dirait Talleyrand repris par un milliardaire narcissique forcément amateur de parfums, et qui est à la diversité culturelle ce que les bijoux de chez Chanel sont à l’humanisme, du coco de pacotille.

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Le racisme ambiant dans la police française trouve toujours à justifier les actes les plus malencontreux ou pervers envers les jeunes Noirs dans une logique épouvantable qui conduit ces derniers à se révolter comme c’est le cas actuellement dans les lycées et par conséquent à réprimer en sachant que depuis quarante ans, rien ne vient interrompre ce cercle vicieux, que ce soit la mort de Malik Oussékine dans les manifestations de 1986 par une brigade motocycliste impitoyable ou celle de deux enfants en 2005 poursuivis par une patrouille à la recherche de proies juvéniles. L’agression récente de Théo par quatre fauves sanguinaires, qui succède à la mort déguisée en « malaise » d’un jeune Noir dans le Val d’Oise l’été dernier à la suite d’une interpellation par des gendarmes, qui a mal tourné, ne sont que la partie visible de l’iceberg de merde raciale qu’est la France d’aujourd’hui, une France pitoyable et indécrottable où le pathétique le dispute avec le tragique au milieu de l’envers du décor en carton pâte des cathédrales et des châteaux, des abbayes et des musées destinés aux visiteurs étrangers. Ces derniers ne sont toutefois pas toujours dupes, surtout lorsqu’ils se retrouvent mêlés involontairement à des scènes de western en traversant les banlieues oubliées des pouvoirs publics pour rejoindre hôtels ou aéroports. La France est en état de guerre raciale, et ce n’est pas la marchande de Nutella qui dira le contraire.

Car, A Grasse, il n’y a pas que le musée internationale de la parfumerie à visiter, il y a les commerces aussi.

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Nos amis Kirikou et Poil de carotte, déjà rencontrés dans une précédente chronique, lorsqu’ils ne sont pas invités par la police à décliner leur identité gémellaire, ont été par le passé les héros involontaires d’une scène que nous qualifierons de cocasse  par facilité de langage,  mais qui en dit plus long sur l’étendue du racisme que de bien longs discours. Adolescents, ils sont partis avec leurs parents en vacances sur la Côte d’Azur, réputée pour la beauté de ses paysages, son climat ensoleillé et ses habitants aussi désopilants que le festival de Nice peut être bruyant.

Août est là, la chaleur aussi en ce milieu d’après-midi à Grasse, terre de parfums qui abrite aussi une sympathique marchande de Nutella. Celle-ci tient boutique dans la rue principale de la vieille ville écrasée de chaleur. Entre dans le magasin le père « caucasien » de Kirikou et Poil de carotte à la recherche de boissons fraîches. Suit Poil de carotte. Jusqu’ici tout va bien. Le père dépose les canettes sur le tapis de caisse lorqu’arrivent Kirikou et son cousin, qu’en des temps anciens qui ne sont pas si anciens, nos prédécesseurs coloniaux auraient appelé Banania. Donc Kirikou et Banania entrent dans le magasin, ce qui provoque un haut de coeur de la marchande et même temps qu’un cri :-sortez d’ici ! Stupéfaction du père qui n’a même pas le temps de bredouiller, que la marchande crie à nouveau : – Sortez de là où j’appelle la police!, alors qu’arrive devant la caisse de la marchande, Poil de carotte pour déposer son petit pot de Nutella, ainsi qu’une boîte de Banania, circonstance hasardeuse miraculeuse.

Silence total!  Stupéfaits, Plus personne ne bouge dans l’attente des explications de la commerçante. Montrant les deux jeunes arrivants, celle-ci déclare alors avec une assurance confondante  : – ce sont des voleurs ! Le père, surpris, retrouve la parole : – Alors là, cela m’étonnerait. – Puisque je vous le dis, ils sont déjà venus hier et m’ont volé de la marchandise, reprend la patronne sûre de ces faits. – Impossible, répond le père tandis que les adolescents demeurent interloqués. – Et pourquoi ce serait impossible, demande la marchande. – Ce sont mes enfants, poursuit le père, et hier, ils ne pouvaient rien vous voler, je vous le garantis, ils étaient avec moi en pleine montagne, à deux cents kilomètres d’ici. La marchande regarde les enfants, puis dit au père d’un air assuré : – Vous plaisantez ?  – Pourquoi voulez-vous que je plaisante, puisque je vous dis que ce sont mes enfants, reprend le père tranquillement. La marchande de Nutella décontenancée, s’énerve : – impossible ! ils sont Noirs… et s’ils ne sortent pas tout de suite, j’appelle la police. – Et bien appelez la police, rétorque le père, j’en profiterai pour porter plainte. Et la marchande, subitement triomphante de s’esclaffer : alors là, je voudrais bien voir celà, la police ici, c’est ma famille, et ils pensent comme moi : les Noirs ? tous des voleurs.

  • Qui sont des voleurs ?, interroge alors une voix qui s’approche, celle de la mère antillaise de Kirikou et Poil de carotte.
  • Ton fils Kirikou, d’après cette charmante dame, répond le père.
  • Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire ?, demande la mère quelque peu surprise. Une toute petite histoire de la France d’aujourd’hui, bête et méchante, qui n’est pas encore pleine de bruit et de fureur comme dirait Shakespeare, mais où quelque chose est pourri dans l’Etat ( de France), toujours pour citer le fameux William.
  • Laisse tomber les commentaires et les provisions, coupe la mère énervée par les citations à l’emporte-pièce, on s’en va.
  • Mais, le pot de Nutella ?, demande Poil de carotte.
  • Lui, on le prend, dit le père en jetant de la mitraille jaune sur le comptoir et s’égaie pour dévaler à terre.
  • En revanche, le Banania attendra. Tout comme le Ciel.

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Grasse n’est pas que la « ville des parfums » vantée par les cartes postales, c’est aussi la ville où vit une épicière qui ne laisse pas entrer dans sa sympathique boutique des enfants noirs et qui peut compter sur la police municipale pour que l’ordre règne. 

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