Introduction aux Antilles

En dehors d’articles consacrés au carnaval et à l’esclavage, il n’a pas encore été proposé beaucoup d’articles sur les Antilles, ce qui est grand tort. Il faut dire que l’attachement conceptuel au conflit, à la division et aux polémiques inutiles n’incitent pas trop à écrire sur les îles françaises d’Amérique, l’emploi même de l’adjectif français étant considéré comme une  insulte par les indépendantistes les plus résolus qui ont une légère tendance à mettre la charrue avant les boeufs. Pourtant, au pays où la tradition d’organiser des concours de boeufs-tirants se perpétue, comme ici à l’île de Marie-Galante, on sait fort bien que jamais personne n’a réussi à gagner une telle course en poussant une charrette.

Au départ de la course de Boeufs-tirants

Pour celle, celui ou ceux qui veulent se rendre dans les îles des Antilles françaises, il n’existe probablement pas de destination où les clichés sont aussi nombreux et injustes. Commençons par le premier, la distance : 6.800 Km pour se rendre de Paris en Guadeloupe ou Martinique, certes, c’est huit heures ou neuf heures de voyage, mais à la réflexion, ce n’est pas plus que de se rendre à, pied à Chartres et bien moins fatiguant, sans compter qu’ il existe des astuces pour améliorer son confort dans l’avion.

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Deuxième cliché : l’accueil y serait détestable. Là, c’est absolument n’importe quoi. Il suffit de s’adresser à la bonne personne, par exemple, la marchande de cornets de pistaches. C’est sûr que si vous lui demandez un sorbet coco, elle se demandera si vous ne vous moquez pas d’elle, et elle aura bien raison de vous flanquer un coup de parapluie. Car à quoi peut servir un parapluie dans un pays où ne font que passer des ondes tropicales ? A se protéger du soleil. Vous en connaissez beaucoup des pays où le parapluie protège à la fois du soleil et de la pluie, parfois au même moment ? Donc, de mémoire humaine, une marchande de cornets de pistaches n’a jamais attaqué un touriste à coups de parapluie, que cela soit dit. Qu’il arrive ensuite qu’on demande à un touriste de payer sa note d’hôtel ou de restaurant, oui, cela peut arriver, et l’accueil s’en ressent forcément côté porte-monnaie.

Martinique . Marchande de cornets pistaches

Troisième cliché : c’est carnaval tous les jours. N’exagérons rien. La période du carnaval commence le dimanche suivant l’épiphanie et se termine le mercredi des cendres, c’est déjà pas mal. En revanche, côté grêve, effectivement, cela peut survenir à n’importe quel jour de l’année et dans n’importe quel secteur, à l’exception du mois d’août et de la période du carnaval, sauf que depuis les années LKP, on peut associer grêve et carnaval, ce qui n’était pas une revendication à l’origine mais est devenu une sorte de conquête sociale : la grêve n’interdit pas le carnaval, le carnaval n’exclut plus la grêve. Et de toute façon, quoiqu’il arrive, à la fin, pour « un petit cent franc« ,  c’est le pont de la Boucan qui est barré.

Carnaval Guadeloupe

Quatrième cliché : on mange de la langouste tous les jours. Hélas, ce n’est plus tout à fait vrai. Longtemps, on a mangé de la langouste aux Antilles comme le saumon en Bretagne. Mais à la suite de l’arrivée des touristes à la fin des années 60, ces derniers qui voulaient manger de la langouste tous les jours ont épuisé les viviers naturels, on en trouve moins, ce qui ne veut pas dire qu’on en trouve plus, la langouste résiste dans les menus, de préférence grillée, mais toujours plus chère. Et le touriste ne connaît pas son bonheur de manger de la langouste.

langouste grillée sauce chien

Cinquième cliché : on ne mange que de la langouste. Faux. On peut aussi manger des crevettes, des écrevisses aussi appelés ouassous, de la daurade,  du thon, de l’espadon, du requin et mille autre recettes, la cuisine antillaise existe, nous l’avons rencontrée et nous pouvons même affirmer qu’elle est l’une des plus diverses au monde en dehors du dimanche réservé au colombo comme la poule au pot dans le Béarn.

Brochettes de crevettes en sauce piquante à la créole : http://www.fourchette-et-bikini.fr/recettes/recettes-minceur/brochettes-de-crevettes-en-sauce-piquante-la-creole.html

Brochette de crevette à la sauce piquante

Sixième cliché : on boit du rhum. On ne peut dire le contraire, il arrive qu’on boive du rhum aux antilles : le rhum est aux Antilles ce que le champagne est à Reims, sauf qu’à propos de champagne, les deux départements français consommant le plus de cols champenois par habitant, sont justement la Martinique et la Guadeloupe. Longtemps, la Guadeloupe tint la corde ; mais, depuis deux ans la Martinique a ravi le titre, la compétition est serrée. Au premier abord, cela peut sembler surprenant, mais il existe une raison qui sera dévoilée dans un prochain article pour maintenir un peu de suspense.

ti-punch antillais

Ti-punch antillais : trois tiers d’eau et un demi citron.

Septième cliché : les plages sont dangereuses et bondées. C’est vrai. Si on considère que le terme « plusieurs » peut être utilisé à partir de deux, il arrive qu’on croise plusieurs personnes sur les plages, pas toutes, on peut aussi s’y retrouver seul et jouer à Robinson Crusoé, sauf pendant les vacances scolaires, car allez savoir pourquoi, les Antillais y débarquent en famille, ils se croient chez eux !

Saint-François, Guadeloupe

Sinon, effectivement les plages peuvent être dangereuses, mais faut vraiment le vouloir, ce n’est pas comme à la Réunion, les requins ne passent qu’au large et bien au large. En revanche, la noix de coco quand elle se détache du cocotier peut blesser ou tuer comme un tir d’artillerie sur une position ennemie. Il faut y penser quand on s’installe sur une plage. A ce sujet, l’inverse est rare : les armées n’utilisent généralement pas la noix de coco pour tirer sur l’ennemi.

Saint-Anne Guadeloupe

Huitième cliché : il n’y a rien à voir. Là, faut être carrément de mauvaise foi pour revenir en n’ayant rien vu aux Antilles. Toute la nature se laisse voir, ainsi que toute l’histoire des Antilles qu’il faut aller rechercher dans des dizaines de lieux différents, parfois fort surprenants.

‎[CULTURE] LES MARCHES DES ESCLAVES EN GUADELOUPE, VESTIGES DU PASSÉ

Neuvième cliché : il ne s’y passe rien. D’un certain côté, tant mieux, car lorsqu’il s’y passe quelque chose, des fois c’est ennuyeux, plus qu’ennuyeux : inondations, cyclones, tremblements de terre, raz-de marée appelés aujourd’hui tsunamis, sans oublier les éruptions volcaniques. Il arrive parfois qu’il se passe des choses épouvantables aux Antilles dont les îles sont à la fois sur le parcours des énormes masses nuageuses traversant l’Atlantique pour se transformer en tempêtes ou cyclones et tout dévaster sur leur passage, et sur la zone de rapprochement des plaques tectoniques américaine et caraïbe. Dire qu’il ne s’y passe rien est d’autant plus faux qu’il existe justement un art de vivre aux Antilles destiné à oublier cette triple menace perpétuelle.

Dixième et dernier cliché : les Français aux Antilles, n’y sont pas blancs pour inverser une expression récente devenue « cultissiment » idiote. N’en déplaise aux amateurs de fausses polémiques, la question de race et de couleur n’y a aucun sens, ici aux Antilles comme ailleurs dans le monde entier. Et de toute façon, le carnaval est justement là pour oublier, tous ensemble, les malheurs, les ennuis et les divisions artificielles ; il est ce qui fait que nous ne sommes plus seul au monde et pas seulement les jours de carnaval. CQFD (à suivre).

Carnaval en Guadeloupe

 

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