Le Voleur d’homme

La huitième édition du dictionnaire de l’Académie française donne du plagiaire la définition suivante : Celui, celle qui s’approprie ce qu’il a pillé dans les ouvrages d’autrui, accompagnée de la citation suivante : La gloire est le seul héritage du véritable génie, […] ; il ne faut pas la lui laisser dérober par des plagiaires. — (Lamartine). Le mot proviendrait du latin plagiarus, voleur d’homme.

C’est exactement ce que vient de faire le nouveau président de la République française, voler la photographie d’un homme pour en tirer une vaine gloire, tout un symbole qui nous annonce des jours difficiles. Car il n’y a rien de plus triste que l’absence d’imagination, quand on se retrouve à jouer au jeu des sept erreurs, ici une fenêtre ouverte, là une horloge, sans oublier le coq et le livre ouvert histoire de montrer qu’on fut et reste un élève attentif et discipliné, au point de se cramponner à son bureau vingt ans plus tard. Tout cela n’augure rien de bon. Sans plagier personne, les bons élèves ne feront jamais que des bons élèves, alors que les mauvais élèves ne peuvent réserver que de bonnes surprises. D’une certaine façon, le colonel de Gaulle, promu général de brigade à titre provisoire en est l’archétype, ayant été condamné à mort pour trahison à un moment de l’histoire où choisir le camp de la liberté n’avait rien d’évident.

Le problème avec les portraits officiels, c’est qu’ils passent de mode alors même qu’ils n’ont pas été encore accrochés en mairie. Sauf quand on s’appelle le général de Gaulle justement, dont le portrait officiel manquait quand il lança l’appel du 18 juin 1940. Personne n’ayant songé ce jour-là à prendre une photographie ou à enregistrer l’appel à résister, ce ne fut que dans les jours suivants qu’on se soucia de communication. Il est vrai qu’il y avait alors mieux à faire : se battre. Et de toute façon, certaines photographies valent bien plus que tout portrait officiel. L’homme providentiel, maréchal suprême, généralissime des armées ou führer diabolique, n’existe qu’à travers ses compagnons d’armes, y compris en temps de paix.

 

Et c’est pour cela que tout portrait officiel n’est que caricature, sauf quand on revient de tout, autant de l’improbable que de l’impossible.

Et c’est pour cela encore que nous devrions plutôt accrocher en mairie qu’une seule photographie officielle, celle du père fondateur de la Vème République. Cela éviterait les polémiques sur cette curieuse mode des costumes étriqués à en faire sauter le bouton comme un bouchon de champagne, en attendant la prochaine fois, un président sans costume et pourquoi pas adepte de nudisme. Car dès lors que les gangsters ne portent plus de cravates ou de costards, il n’y a pas de raison de s’arrêter là, à la prochaine élection, promis, nous ne voterons pas pour le con vantard le plus nul, mais pour le nu le plus convaincant. Et pour une fois, ce ne sera pas les perdants mais le vainqueur qui ira se rhabiller.

Au fait, il y a plus lamentable encore que de voler un homme : consacrer un article entier à chercher la mouche à merde tournoyant sur une crotte fraîche dans le bac à sable des enfants d’un square abandonné à des pochtrons une nuit sans lune. Un pisse-vinaigre d’un journal de milliardaire réussit ce tour de force sans même une plaisanterie en perspective. http://www.msn.com/fr-fr/actualite/france/que-nous-dit-la-photo-officielle-du-pr%c3%a9sident-macron/ar-BBDsyvO?li=BBoJvSH&ocid=mailsignout

Communiquer, c’est mentir. Sur cette photographie, l’art de la mise en scène est bien visible, en arrière-plan, avec un soldat filmant la poignée de main entre Hitler et Pétain à Montoire, avec la volonté d’afficher pour la postérité que les deux hommes sont à égalité alors que la France est défaite.

 

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