Umuntu ngumuntu ngabantu

Tableaux 92 Voici trois ou quatre jours, j’ai reçu le message suivant. L’affaire est trop sérieuse pour que cette fois je laisse de côté ma pirogue et mes plaisanteries d’écrivain virtuel en  peau de banane :

Seul un amoureux de l’humanité peut raisonner de la sorte. Enseigner l’Histoire, toute l’Histoire c’est respecter l’humanité dans sa totalité. C’est retrouver une dignité en apprenant de ses erreurs et en assumant son passé. Sans verser dans le jugement inutile. La philosophie Ubuntu nous enseigne que chaque être humain est important car il est lié aux autres êtres humains. Il est humilié quand les autres le sont, opprimé quand les autres le sont aussi. Les africains partagent la douleur des juifs. « Umuntu ngumuntu ngabantu » (je suis ce que je suis grâce à ce que nous sommes tous). Nous savons que chaque individu a besoin des autres pour vivre pleinement. Nous voulons juste nous battre pour revendiquer notre existence au même titre qu’un juif, un musulman, un occidental, un oriental. Cette manière de penser dépasse d’ailleurs les frontières africaines. L’anglais John Donne disait au 17 ème siècle « La mort de tout homme me diminue parce que je suis membre du genre humain. Aussi n’envoie jamais demander pour qui sonne le glas : il sonne pour toi ».
 Alors merci Cervières d’avoir partagé, toi l’amoureux de l’humanité. Au plaisir de te relire.

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Lorsque j’ai ouvert le site il y a quarante jours, je ne pensais absolument pas recevoir un jour un message de cette sorte qui me bouleverse et me dévaste en remontant le fleuve de l’histoire avec ma pirogue  !

Et puis, il y a cette magnifique phrase : les africains partagent la douleur des juifs !  Si Dieudonné et bien d’autres pouvaient devenir Ubuntus. Et les religieux juifs orthodoxes, et les Fous guerriers de Daech, sans oublier Boko Haram. Et tous ceux qui pleurent sur le fleuve Babylone. Et les Russes « poutinesques », sans oublier les militaires chinois.

Mais nous, Occidentaux, quelle douleur partageons-nous ? Celle des Africains ? Laissez moi rire. Je vous surprendrais, mais heureusement, nous Européens, que nous avons Angela, il y a chez cette femme une véritable humanité qui n’est pas désuète et hypocrite : elle sait ce que c’est que la souffrance pour avoir tout supporté dans sa jeunesse. Mais sinon ? Nous Occidentaux sommes préoccupés que de solder nos dettes et amasser assez de pognon pour nos retraites. Qu’il est loin le temps où nous envoyions des jeunes coopérants aux quatre coins du monde ! On laisse faire aujourd’hui des ONG subventionnées et défiscalisées qui recrutent leur personnel sur place et vous bombardent de messages de demandes de dons en fin d’année. De quelle humanité parle-t-on ?

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C’est facile de se prétendre humaniste, de faire dans les bons sentiments de pacotille. Pour ma part, je ne me prétends pas humaniste, et je me méfie des occidentaux amoureux de l’humanité, ils ont vite fait d’aller régler leur compte à la terre entière. Je connais mes racines, mon histoire occidentale, je n’ignore rien des crimes passés, la conquête de l’Amérique et la destruction des tribus indiennes, y compris les cinq tribus dites civilisées qui les accueillirent à bras ouverts ! Je n’ai pas oublié l’anéantissement des civilisations incas et aztèques, le colonialisme et l’esclavagisme qui allait de pair, ou les révolutions rationnelles au nom des Lumières depuis 1789, la Vendée Vengé et la Terreur, les guerres napoléoniennes, le communisme, le fascisme et le nazisme, la destruction des Juifs d’Europe, Hiroshima mon amour contraint et forcé. Que je le veuille ou non, c’est notre histoire occidentale, c’est mon histoire et je ne puis rien oublier. Alors laissez moi avec ma misère et ma culpabilité pour les cinq derniers siècles que nous avons passés à ravager le monde, ne me remerciez de rien, condamné que je suis à être attaché au rocher pour mille ans de solitude : le diable bouge toujours.

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Si nous voulons vivre en paix, il nous faut avoir aujourd’hui l’âme d’un croisé pacifique. Pour ma part, je suis d’une certaine façon un descendant des Vikings et surtout de  Foulque Nerra, ce comte d’Anjou, qui par trois fois au début de l’an Mil, a fait le pèlerinage de Jérusalem pour demander à Dieu pardon pour tous les crimes qu’il commettait ; et ses crimes étaient immenses entre guerres et pillages, n’hésitant pas à ravager ses propres abbayes, tuant et massacrant. Mais Foulque Nerra était courageux. Par trois fois, il s’est rendu d’Angers à Jérusalem, par terre et par mer, se flagellant devant les Arabes ébahis et admiratifs en traversant la Vieille ville tout au long du chemin de Croix jusqu’au Saint Sépulcre. Nous, pèlerins contemporains, n’avons aucun mérite en comparaison. Sur Gallica on trouve un récit de l’un de ses proches, assez incroyable sur le bonhomme. Ah ! C’était autre chose que le combat des 35 heures ou Je suis Charlie. Tout le monde y passait et trépassait au fil de l’épée.

Et c’est pour cela que j’ai choisi, après trois pèlerinages à Jérusalem, de remonter le long fleuve de la littérature, pour confronter  notre histoire  aux facultés de l’inutile et aux singes qui viennent réclamer leur crâne, comme dirait ironiquement Iouri Dombrovski s’il était encore vivant, une longue remontée pour ne plus être associé, par exemple, aux sornettes sur un prétendu roman national d’histoire qu’il faudrait faire revivre. C’est insupportable cette histoire de Roman national, moi qui suis citoyen du monde d’éducation européenne et d’expression française. Un point c’est tout côté papiers et visas. Laissez vos passeports et cartes d’identité à l’entrée du site, vous êtes tous bienvenus les réfugiés amoureux de la langue française, plus de 275 millions sur cette terre paraît-il, Canadiens et Arméniens, Haïtiens et Ethiopiens, Antillais et Réunionnais, Wallons et Béninois, ma pirogue est assez vaste pour vous accueillir tous. En plus, il n’y a pas de droit de passage, tout est là, libre à vous de piocher.

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C’est pourquoi, il nous faut dire la vérité à nos enfants qui viennent aujourd’hui du monde entier, dire que Napoléon était un esclavagiste et un criminel, dire que la Révolution a mis en place un système de terreur, que les cases de l’esclavage n’étaient pas des maisons de repos et que la traite négrieren’était pas simplement du commerce triangulaire mais aussi un système tripartite entre certains européens, certains africains et certains arabes avec la complicité des pouvoirs en place, royaumes, émirats et empires ; et encore, que le système colonial était un système d’exploitation économique ; et que nous Européens avons laissé, voire dans certains cas aidés, les nazis pour procéder à l’extermination des Juifs d’Europe faute d’avoir « dégommé » à temps les criminels sadiques ralliés à Hitler, oui nous devons être clair sur notre histoire, y compris les pages les plus sombres et les pages les plus récentes sur l’Islam guerrier, tombeur de têtes, si nous voulons réellement accompagner nos enfants sur les chemins de la paix et de la fraternité.

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Comment faire ? c’est très simple. Avoir confiance. L’Homme ne peut pas tout. Il faut parfois, comme de Gaulle le 18 juin 1940, s’en remettre à la Providence, à cette triple évidence évoquée par Galanskov  de révélations divines, de sincérité et de vérité, autrement appelées la Foi. Foulque Nerra avait la foi, celle d’un guerrier. Pour ma part, j’ai mille ans plus tard la même foi, je suis tombé dans le baptistère tout petit comme Obélix dans la marmite, j’ai la foi d’un guerrier, avec une différence cependant, celle d’avoir retenu la leçon de mille ans d’histoire, je suis devenu un croisé pacifique ! Et je marche plutôt sur les pas des Franciscains de la Custodie en Terre Sainte, fréquentant les Bénédictins si musiciens et admirant dans mon quartier l’action silencieuse des Religieux de Saint Vincent-de-Paul au service des plus pauvres, jusqu’à en sacrifier leur vie, comme mon Confesseur.

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A part cela,  bien sûr que Desmond Tutu et Madiba, c’est du sérieux ; ils ont fait leurs preuves et plus que leurs preuves tout de même, c’est indéniable, c’est indiscutable, c’est miraculeux pour un pays qui a connu si longtemps un système effroyable d’apartheid, l’apartheid des assassins, pas celui du communicant ! Et c’est réellement dommage que ce concept Ubuntu, encore trop méconnu, ne soit pas mieux partagé partout où il y a des conflits, en Ukraine, au Proche-Orient et dans de nombreux pays d’Afrique, ou bien encore, ne l’oublions surtout pas, en Amérique latine ravagée par le crime organisé.

Merci donc pour ce magnifique message qui me touche droit au cœur ; mais par prudence et humilité, ne me dites pas que je suis amoureux de l’humanité. Et puis, dois-je vous l’avouer, je n’aime guère les concepts abstraits comme l’humanité, je m’en méfie terriblement, je suis uniquement amoureux de personnes, femmes, enfants, pauvres, handicapés, gens simples et tranquilles, pêcheurs d’eau douce, laboureurs de Millet, et même sonneur de cloches, vous savez ce sonneur de cloche dont parle John Donne, celui qui sonne le glas qui sonne pour lui. Et qui garde le sourire même si le clown souffre pour reprendre l’image de Black M qui m’enchante, ces temps-ci, chaque fois que je l’écoute.

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http://fr.wikipedia.org/wiki/Ubuntu_(notion)

http://fr.wikipedia.org/wiki/Ubuntu

NB : au fait, après l’Arménien, l’Amharique, l’Hébreu, le Wollof et le Bas-Normand, voici qu’il me faut ajouter dans la liste des traductions futures, les langues bantoues !