Et toi, tu marcheras dans le soleil

Regardant Key entrer dans l’eau pour aller voir la mer mêlée au soleil, il m’est revenu l’ultime phrase adressée par Rimbaud à sa soeur Isabelle, alors qu’il allait rendre l’ âme à Marseille, le 9 novembre 1891, hospice de la Conception :  J’irai sous la terre, et toi… Et toi, tu marcheras dans le soleil ».

S’il est une preuve de présence d’éternité sur la terre, c’est bien au coucher du soleil à l’ Anse de la Perle, lorsque ma petite-fille gambadant dans les flots s’en vient rejoindre la mer allée au soleil,  la nuit succédant au jour qui succède à la nuit depuis le premier matin jusqu’à notre dernière heure sur terre, sans rémission possible.

La vie n’est rien qu’Amour recommencé nuit et jour pour témoigner du miracle de la Création, Et Key en cette heure, dans le galop des vagues, porte l’espérance d’ une nouvelle génération succédant aux précédentes générations, comme un éternel recommencement de la vie humaine entre terre, mer et ciel, là où se rejoignent la lune, le soleil et les étoiles.

Chaque être humain est un astre paisible à la naissance, chaque souffle de vie appartient à l’éternité retrouvée qui n’est rien d’autre qu’une petite fille courant dans la mer vers les rayons de  soleil s’en allant se coucher à seize kilomètres de là, de l’autre coté de l’ horizon, promesse d’ une nouvelle aube.

Et moi, en cet instant et alors que se rapproche,  de plus en plus proche, la perspective d’ aller sous terre, je suis le plus heureux des hommes, comblé d’enfants et petits-enfants, ces derniers  tous originaires de trois continents :  l’Europe, l’ Amérique et l’ Afrique.

La vraie vie, la vraie réussite d’ une vie est tout simplement de passer le témoin d’une génération à l’autre, en toute humilité de n’être toute une vie sur terre, que poussière rendue à la poussière.

Et en attendant, de veiller pour le moment que Key ne s’éloigne pas trop de la terre ferme, sur le sable et dans les ondes, dans une vaine poursuite de l’astre perdu de vue.

Il y eut un soir, il y eut un matin

Et toi, tu marcheras dans le soleil tandis que je m’en irai sous la terre.

Orietur, 262