L’épouvantail et les étourneaux

Dans un pays où la ruralité se limite désormais à regarder à la télévision l’émission Le Bonheur est dans le pré, présentée par la ravissante Karine Le Marchand, idéale en parfaite ingénue et qui est loin d’avoir une tête de linotte comme elle l’a prouvé avec talent en animant les entretiens politiques d’une Ambition intime, on peut se demander aujourd’hui ce que les Français connaissent vraiment des étourneaux et de l’épouvantail à l’approche des élections présidentielles, quand ils ne peuvent plus déjà faire la différence entre un corbeau, un passereau ou cet étourneau.

La femelle passereau est opportuniste

A en croire un blog consacré à la planète Terre, Gaïasphère, la femelle passereau serait « opportuniste« . Allons donc ! « Elle ne choisit pas son partenaire en fonction de considération purement esthétique, comme on le croyait jusqu’ici. En réalité, elle choisit son mâle reproducteur en fonction de caractéristiques utiles à la réussite de la couvée de l’année ». Comme on dit au cinéma, toute ressemblance avec la nature humaine serait purement fortuite.

Cela fait penser que d’un point de vue politiquement correct, il faudrait bannir du vocabulaire des mots tels que ravissant, ingénu ou tête de linotte quand on parle d’une femme, mais justement, c’est ce politiquement correct qui nous étouffe alors même que la journaliste en question en remontre fichtrement à tous ces cracheurs de feu que sont un grand nombre de journalistes politiques retors qui ont pour obsession unique d’allumer l’audimat [ci-dessus en introduction et non ci-dessous, image extraite du film Le dernier brin de paille].

Karine Le Marchand anime «Une ambition intime» sur M6.

L’étourneau sansonnet, donc, dénommé par Linné en 1758 Sturnus vulgaris, ressemble à un merle noir mais il a une queue courte et carrée, et des ailes pointues et triangulaires. Les ailes et la queue sont noires. Le bec est jaune avec la base gris-bleu chez le mâle, et rosâtre chez la femelle. Voilà pour sa description dont on trouvera sur le site Oiseaux.net des détails bienvenus. Il est surtout connu pour être très en voix, chantant n’importe quand, son chant variant des des sifflets mélodieux, des cris rauques jusqu’aux imitations réussies de sons tels que les chants d’autres oiseaux, les téléphones, les carillons de porte et les klaxons.

Vol d’étourneaux sur un nid de cérales.

Les étourneaux sont aussi très grégaires, migrant en masse, se nourrissant et se reproduisant en groupes. Et plus ils sont nombreux, plus ils peuvent devenir agressifs, étant par ailleurs très bruyants, déversant leurs fientes sans respect de la nature inhumaine que sont les zones urbaines, petits salopiaux ! on dirait bien des Français à la réflexion. Et comme ils peuvent sans cesse changer de direction lorsqu’ils volent en masse, pour s’éparpiller et se regrouper à nouveau en un ballet fantastique, on est certain cette fois qu’il s’agit de Français habités par les ferments de division pour toujours se regrouper et se chamailler à nouveau. C’est d’autant plus vrai que la réputation de l’étourneau n’est plus à faire, il pille les vergers ou les stocks de céréales comme d’autres les services sociaux, il est pour résumer, vorace, bruyant et changeant, pouvant revendiquer au titre du droit du sol d’être un bon Français !

Point n’est besoin de présenter de son côté, l’épouvantail. Il fait à la fois le bonheur des oiseaux et des enfants, n’épouvantant personne sauf le ridicule quand il s’agit d’un homme justement habillé en épouvantail. Cela dit, l’épouvantail peut être dangereux pour l’homme en certaines circonstances inattendues, comme l’a observé la police argentine qui découvrit le corps d’un homme décédé pendant un rapport sexuel avec un homme de paille qui n’avait rien d’un mafieux (article paru dans Direct matin du 5 avril 2015 reprenant un article d’un journal argentin du 2 avril, qui est tout de même le lendemain du 1er avril…)

Acabó muerto después de tener sexo con un espantapájaros - Perversión y muerte en Balcarce (archivo).

Techniquement, l’épouvantail  est un grand bâton planté en terre, vêtu de haillons et de frusques de la saint glinglin, destiné à éloigner les oiseaux des potagers, des vergers et des jardinets ou encore des champs semés pour une prochaine récolte. Et le plus souvent, on retrouve les oiseaux qui auraient du être effrayés, nichés sur l’épouvantail dont la réussite est plutôt rare sauf en certaines circonstances comme le raconte un certain Wesbeirger en 1904 dans Trois mois de campagne au Maroc : Les têtes sont salées et expédiées aux quatre coins de l’Empire pour y être exposées au-dessus des portes des villes et servir d’épouvantail pour ceux qui seraient tentés de se révolter contre l’autorité chérifienne. Sans aller jusqu’à adopter ces excès qui par le passé ont défrayé les chroniques des jacqueries, on peut cependant imaginer que dans les mois à venir, le loden vert pourrait fort bien être accommodé en épouvantail dans les campagnes les plus reculées où les promesses des candidats n’ont jamais nourri un paysan.

épouvantail rigolo

« Le brun vous va si bien », compliment du candidat bobo bio des villes au travailleur des champs qu’on appelait autrefois « paysan »

A cette dernière exception près, les épouvantails n’ont jamais longtemps épouvantés, surtout pas les étourneaux et encore moins les Français. Et c’est pourquoi, lors des prochaines élections présidentielles, on ne peut jurer de rien, surtout lorsque le plus improbable devient le plus prévisible, autrement dit, il n’est plus exclu que le Front national qui longtemps a servi d’épouvantail aux électeurs étourneaux, ne finissent par rassembler une majorité de suffrages exprimés dès lors que de nombreux étourneaux étourdis s’étourdiraient  au point de se détourner d’aller voter au second tour faute de pouvoir choisir un candidat susceptible de rassembler bien au-delà de son propre camp. C’est une hypothèse qui ne peut plus être exclue si lors du second tour des primaires de la droite et du centre, les primaristes en viennent à sélectionner un candidat sectaire dont le programme économique et social se limite à reprendre les propositions les plus hasardeuses et outrancières des patrons du CAC 40, qui ont discrèrtement confié la plume à un assureur dont on sait qu’il ne s’agit pas d’une profession défendant l’ascenseur social puisqu’il n’y a guère de différence de statut entre voleur et assureur, sutout à l’échelle internationale.

Sous le regard avisé de journalistes, voici un débat animé d’étourneaux se disputant les pauvres pommes d’électeurs.

Soyons clairs : le programme économique et social du prétendant tenant à ce jour la corde pour représenter le camp de la droite et du social est à l’ultralibéralisme ce que les esxcès des Ultras furent à Louis XVIII à son retour d’exil en 1815 : un tombereau de brutalité, annonciateur du passage de la Restauration à la Révolution de 1830. Ce que les radicaux extrêmistes du capitalisme nous préparent pour 2017, ce n’est pas une prétendue rupture mais une perspective funeste d’un conflit de génération, le risque d’une guerre sociale généralisée qui deviendrait une guerre civile dès lors que toutes les brindilles de la haine s’enflammeraient, jusqu’à cette folle promesse d’instaurer le droit du sang là où la France a toujours choisi le droit du sol pour accueillir les populations étrangères. Sans oublier l’interdiction des burkinis qui devrait s’étendre au turban d’Alice Sapritch, paix à son âme, et aux burnous s’il y avait un minimum de logique dans ces promesses démagogiques.

Les épouvantails sont disséminés dans les jardins de l'abbaye.

L’épouvantail est habituellement un défenseur acharné du droit du sol : ici, en famille, ils se sont réfugiés à l’abbaye cistercienne de Villelongue, organisatrice d’une journée de l’épouvantail en fête, et qui, fondée voilà plus de huit siècles, a une longue tradition d’accueil que ne renieraient pas les Bénédictins de Solesmes.

Le drame de la France, c’est toujours de préférer systématiquement les sirènes hurlantes de la division à l’appel du rassemblement, les vaines promesses d’affrontement idélogique au choix du compromis pragmatique comme nos amis allemands qui sont capables de gouverner ensemble quand il y a péril en la demeure. Au lieu de celà, nous avons droit au spectacle lamentable des programmesviolents répétitifs à l’ absurdes où la rupture théorique se confronte à la radicalité extrême, oubliant qu’un pays qui se saborde ainsi est un pays qui fait inexorablement naufrage.

Le Radeau de la Méduse (Musée du Louvre, 1818-1819)

Le radeau de la Méduse, chef d’oeuvre de Géricault (1818-1819),  exposée au musée du Louvre, relate un fait divers intervenu en juillet 1816 au large des côtes de Mauritanie, lorsque la frégate comprenant quatre cents membres d’équipage et passagers, s’enlisa par incompétence sur le banc de sable d’Arguin, obligeant à embarquer sur des canots de sauvetage en trop faible nombre…

Voici deux siècles, ce drame épouvantable devint criminel  lorsque le capitaine et les « passagers d’élite » embarqués sur les canots de sauvetage, laissèrent par égoïsme, cent cinquante  matelots et miséreux du petit peuple dériver sur un radeau, appelés à survivre douze jours sans eau douce et pain en suffisance, obligeant à endurer un dénuement extrême qui provoqua des scènes d’anthropophagie. Géricault lorsqu’il peignit ce fait divers apocalyptique en fit une allégorie de l’espérance. Il ne pouvait imaginer que deux siècles plus tard, ce serait toute la classe politique française qui irait, de divagations en élucubrations et de vagues électorales en ressacs bavards et stériles, jusqu’au sabordage et au naufrage au point de ne plus voir poindre à l’horizon, qu’un épouvantail planté en terre où des étourneaux étourdis s’en étaient allés en masse, bruyants et affamés, se réfugier.

Etourneau indécis sur une branche

Qu’à Dieu ne plaise que cette fable politiquene se réalise pas. Mais si d’aventure, nos compatriotes si volatils lors des élections, renonçaient à ce que le Meilleur d’entre nous rassemble tous les hommes de bonne volonté, alors tout sera possible ; car jusqu’à nouvel ordre, en cuisine électorale comme en cuisine, on n’a jamais fait de salade française en sélectionnant les petits pois ou en écartant les carottes, la salade française étant en Macédoine ce que la macédoine est en France. Il faut aujourd’hui rassembler tous les métiers, toutes les générations et toutes les origines populaires pour que la nation française se perpétue au fil des âges et des peuplements, et ne se contente pas de faire porter aux enfants d’école un uniforme d’un vert loden, qui serait lui aussi susceptible de faire figure d’épouvantail à l’avenir.

   

Après le retour de l’uniforme, menons un juste combat pour rétablir le bonnet d’âne, l’encrier et le poèle à bois, écologiquement bio !

Au fait à propos d’école, sachant que les effectifs physiques des trois fonctions publiques d’Etat, territoriale et hospitalière, s’élevaient en 2013 à 5,4 millions d’agents publics,  que 53% de ces derniers vivaient en 2011 avec au moins un enfant de moins de 25 ans, que l’effectif des pensionnés civils s’établissait en 2014 à 2,8 millions de personnes et que les entreprises publiques regroupaient 800.000 salariés et que le nombre des retraités de l’EDF et de la SNCF étaient au nombre de 500.000, quelle est la probabilité que ces 9,5 millions d’électeurs, soit plus du cinquième de l’électorat, vote  pour un candidat qui défouraille à tout-va sur les fonctionnaires et se tire une balle dans le pied en croyant rester droit dans ses bottes ? Bonnet d’âne pour le futur perdant des élections présidentielles !

Manteau type loden vert foncé

L’épouvantail n’hésite pas à se grimer pour faire peur, méthode d’approche de l’électorat qui n’est pas sans succès ces temps derniers, au Royaume-Uni ou aux Etats-Unis, et pourquoi pas demain en France ?