Premier dialogue humaniste avec l’auteur virtuel

DSC03265 Un mois après l’ouverture du site, il est temps de faire un premier bilan avec l’auteur virtuel. Celui-ci a bien voulu répondre à toutes nos questions ; il n’aurait plus manqué qu’il refusât. Mais  Après avoir regardé ma carte de visite de journaliste virtuel, il a bien volontiers se prêter au jeu car selon lui, dès lors que nous vivons dans un monde virtuel, tout le monde se fiche de la vérité, et c’est très bien ainsi : les gens sont heureux, virtuellement heureux. Ils barbottent dans leur bain ou jacuzzi pendant qu’il pleut. Pourquoi leur demander plus ? 

Que recherchez-vous en publiant régulièrement des chroniques sur le site Cervières.com ?

– Ce ne serait pas sincère de répondre : Pas grand chose. Les chroniques répondent à un double objectif. D’une part accompagner la compréhension d’une oeuvre littéraire plus complexe qu’un résumé idiot de couverture, comme par exemple pour le premier livre publié, Itinerario, cinq à dix lignes qui laissent croire qu’il s’agit d’une enquête sur la disparition d’une joueuse de tennis. La joueuse de tennis n’est même pas en fond de court à renvoyer la balle, et l’enquête est minable, il s’agit de la mise en scène d’une histoire d’amour assez banale qui se prolonge sur deux mille pages et plus, ce qui est un peu moins banal.

Et le second objectif ?

– C’est sans doute un peu prétentieux. Mais, bon, il faut bien se lancer. Développer une approche humaniste, à la façon de Petrarque par exemple. Revenir aux sources de la culture, comme l’a si bien fait le natif d’Arrezo, au demeurant une ville dont je conseille la visite, car comme de nombreuses villes de Toscane, son charme est indéniable. En plus, ce fut la préfecture du département de l’Arno sous la France des 130 départements de Napoléon. Un des chapitres de La Tempête se passe à Arezzo, en hommage discret et modeste à Stendhal et Giono, qui tous deux ont tant aimé l’Italie. Il faut lire ces deux grands écrivains.

Avec ces digressions, vous ne répondez pas véritablement à mes questions. Que recherchez-vous en publiant ces chroniques ?

– J’en sais rien. Ecrire, tout simplement, renouveler mon mode d’écriture. Ne plus être enserré dans les contraintes épouvantables de projets au long cours. J’en ai soupé de la traversée de l’Océan pour remonter les fleuves jusqu’aux sources du monde. Vous imaginez, vous, ce que c’est d’écrire un roman fleuve de 366 chapitres et d’en être péniblement à l’écriture du 338ème, avec 28 chapitres à tartiner entre diverses occupations. C’est un travail de galérien. Sans compter les dizaines de personnages qui s’agitent, au point que l’auteur s’y perd. Il y a autant de personnages que de chapitres. L’objectif était d’en avoir pas un de plus, pas un de moins. j’ai renoncé, le bateau tanguait, il y en avait dans les chaloupes, d’autre sur le ponton, au bord du fleuve. Alors, les chroniques, c’est de l’amusement, un peu de la joie de vivre, du pur divertssement.

Canzoniere, l’oeuvre majeure de Pétrarque qui célèbre l’amour qu’il porte à Laure de Sade, comprend 366 chapitres. Est-ce un hasard si Roman d’espoir comporte aussi 366 chapitres ?

– Croyez le ou non, l’obstination du hasard fait bien les choses. C’est un pur hasard ou presque, de même qu’une des rubriques du site s’appelle Les Fragments.  Cela dit, comme je vous l’ai déjà expliqué, Pétrarque regardait vers le passé pour mieux se porter vers l’avenir. C’est un objectif commun à tous les humanistes que de pratiquer ainsi, regarder dans le rétroviseur pour avancer sur la route. DSC00632

Jardin d’oliviers en Toscane, Italie

Parlez-nous justement de ces chroniques ? Satisfait du résultat ?

– Non. Plus exactement : non, pas encore. L’écriture est trop sérieuse, pas assez débridée, pas assez légère. Je me sens obligé de faire dans l’ennuyeux, le prétentieux des bibliothèques ; c’est que je prends le lecteur au sérieux, il en veut pour son argent, le lecteur que je ne connais pas ! Et puis, pour commencer, il faut une certaine retenue, de la prudence, il ne faut pas choquer. Si vous intitulez une chronique Pouchkine l’Africain ou Toltsoï au Kibboutz, vous risquez de réveiller l’instinct de chasseur d’ours du Russe. vous le ferez sortir de son isba. Alors imaginez un prochain article qui s’appellerait le Guépard au bordel.  Le lecteur risque d’annuler son abonnement et d’exiger le remboursement.

Justement, le lecteur ne paye rien !

– Oui, mais il donne de son temps. Et le temps est le bien le plus précieux dans notre monde virtuel. les  gens sont trop occupés, ils n’ont même plus le temps de se dire bonjour, au revoir. Ils se quittent comme des malotrus, sans même se dire adieu, ou simplement : au revoir, Si Dieu veut. A ce sujet, je pourrais vous raconter une histoire édifiante, mais je la réserve pour plus tard ou jamais. Plutôt jamais. L’auteur virtuel doit rester discret, secret.

Parlez-nous alors de Roman d’Espoir ? La signification du titre pour commencer.

– Oh ! c’est une très longue histoire.  Le roman fleuve a d’abord eu pour titre le Projet OCCGIC, ce qui, vous l’avouerez est assez obscur. Ensuite, il s’est appelé pendant longtemps, le Théorème d’Arjuna, ce qui, vous l’avouerez est assez inquiétant de vouloir faire rimer démonstration mathématique et littérature. Et puis, il a pris le titre de Voyage aux sources du monde, ce qui est assez prétentieux, mais définit bien le projet.   C’est un voyage au long cours, une référence à plusieurs livres qui ont marqué l’auteur virtuel, Voyage au bout de la nuit de CélineUlysse d’Ithaque d’Homère et Ulysse de Dublin de Joyce, mais aussi les récits de voyage en Afrique de l’Est, tel celui du Père jésuite Lobo en Abyssinie ou encore celui de Burton à la découverte des sources du Nil.  Et puis, dans les tous derniers jours de l’automne dernier, le titre Roman d’Espoir s’est imposé naturellement.

Comment l’idée du titre est-il venu ?

– Je n’en sais rien, sincèrement. Une brusque inspiration, un peu comme une révélation divine pour reprendre l’une des trois exigences qui s’imposent à l’écrivain selon Galanskov, avec la sincérité, justement, et la vérité. Je peux vous donner la date, le lieu et l’heure si cela vous chante, un peu comme Claudel derrière son pilier à Notre-Dame, mais en ce qui me concerne ce n’était pas pour une conversion soudaine, juste pour trouver un foutu titre à un roman fleuve, un titre qui m’échappait depuis des années. Mais il faut se méfier des expressions redoutables telles que révélation divine. Parlons simplement d’inspiration pour le moment.

A ce propos, respectez-vous les trois exigences de Galanskov ?

– Ce serait bien orgueilleux et inutile. Je n’ai pas vocation à me prendre au sérieux. Restons dans l’art du divertissement. mais Galanskov a raison : si vous voulez être écrivain, vous devez respecter ces trois exigences. Pour ma part, je ne suis pas un écrivain, mais un simple auteur virtuel, heureusement. Sinon, je serais dans la panade, obligé par la sincérité et la vérité de raconter n’importe quoi, de prêter serment, de jurer fidélité à la littérature et pour terminer de m’embarquer dans le désespoir du mensonge, ce mensonge déconcertant que dénonce Galanskov. Restons dans le registre de la Faculté de l’inutile. Un équilibriste sur un fil, vingt mètres au-dessus du sol, travaillant sans fil et sans filet, n’a pas le temps de se poser toutes ces questions s’il ne veut pas tomber. il doit avancer.

Pour les lecteurs, pouvez-nous alors donner le lieu, la date et l’heure de cette inspiration ? Et précisez si cela a de l’importance ?

– A Paris, à proximité de la butte Montmartre, le 18 décembre 2014 à… je ne me souviens plus de l’heure, et je ne sais plus pourquoi j’ai choisi ce titre. c’est en fait sans importance, ce qui compte, c’est l’oeuvre.

A propos de l’oeuvre, parlez-nous de l’intrigue ?

– Elle est toute simple. c’est une histoire d’amour. les plus beaux livres sont des histoires d’amour, Roméo et Juliette, Héloïse et Abelard, Plutarque et Laure, Tristan et Iseut. J’ai toujours voulu écrire une histoire d’amour impossible qui se termine bien ou mal peu importe, mais qui soit un roman fleuve comme cette histoire de Bergère, l’Astrée d’Honoré d’Urfé, qui se passe à proximité des monts de Cervières.

Et donc, cette histoire d’amour ?

– Oh ! elle est toute simple. C’est l’histoire d’Abyssinia, une orpheline, qui aime Lô qui n’aime que lui-même. Et cela dure deux mille pages, parce que justement, leur histoire d’amour est perdue au milieu d’une foule de personnages pour que personne ne fasse attention à cette histoire simple comme toutes les histoires d’amour, car on ne prête pas attention aux histoires d’amour des autres bien trop préoccupé par notre propre histoire, notre propre vie, notre propre survie. Nous sommes seuls au monde face à nos illusions, et c’est en cela que l’histoire d’Abyssinia peut être intéressante. Orpheline, elle est seule au monde depuis sa naissance, atrocement seule au monde, et elle va apprendre à survivre, à vivre et à aimer, aimer étant la seule façon, pour nous tous, êtres de chair si faibles et si humains, de respecter la triple exigence de révélation divine, de sincérité et de vérité.

Je vous remercie d’avoir bien voulu répondre à nos questions. Vous êtes fort civil. Nous aurons, je l’espère, l’occasion de poursuivre ces discussions

– Pour votre gouverne, méfiez vous des gens civils et courtois. Ils sont souvent cruels et féroces, terriblement féroces, atrocement féroces. Prenez les grands écrivains français du XIXème, ils sont tous féroces à un moment ou à un autre. Chateaubriand, Hugo, Balzac, Stendhal, Flaubert, Zola. ils font tous dans la férocité féroce. Ce sont de grands félins qui tuent avec leur plume. DSC00641

Lion, porche de la basilique supérieure Saint François à Assise, Italie